La richesse des proverbes et dictons en Côte d’Ivoire, notamment à travers ses langues locales, son argot (le nouchi), ses croyances, mise en rapport avec l’itinéraire des éléphants à la CAN donne l’impression que ces derniers avaient leur parcours tout tracé avant le début de la compétition, sinon ils s’en sont inspirés quand tout semblait compliqué pour eux, ou même que le sort a beaucoup joué en leur faveur… Dans tous les cas, les proverbes parlent le mieux de ce parcours palpitant…
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De prime abord, Il y a bien un commencement à toute chose. Le proverbe nouchi le dit : « Au commencement du film, chef bandit est toujours djaouli », en d’autres termes, au début du film, le chef bandit est très entreprenant, voire surexcité, il a un réel avantage sur le héros sur qui il prend le dessus momentanément. Ce que le proverbe ne dit pas, mais qu’il évoque plutôt, c’est le sort de ce dernier, le chef bandit, en fin de film. Il est défait.
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Lorsque l’on voit le début de compétition, en fanfare, des éléphants (une éclatante victoire contre la Guinée Bissau) ils entraient tout doucement dans la peau du trouble fait, comme ‘‘le chef bandit’’, sans s’en rendre compte ; surtout pour un outsider, c’était la trajectoire idéale pour un arrêt brutal de la compétition au tour suivant, elle serait l’équipe à battre et à abattre ; avec la pression due au statut de pays hôte de la compétition et les attentes de 30 millions de supporteurs et tout, les choses n’allaient pas s’arranger pour les éléphants.
Heureusement le sort en a décidé autrement. En dépit des contreperformances de la Côte d’Ivoire contre le Nigeria et une équipe de bas de tableau, la Guinée Équatoriale ainsi que les injures, les moqueries et les humiliations qui s’en sont suivis, l’équipe s’est finalement providentiellement qualifiée en huitième, timidement, sous les radars, incognito. Elle continue étrangement son parcours malgré tout, alors que les favoris de la compétition : le tenant du titre sénégalais, le vice-champion Égyptien, les cinq qualifiés au mondial et d’autres équipes qui avaient débuté la compétition en fanfare sont tous tombés, même la Guinée Équatoriale qui l’avait lamentablement battue. Comme quoi, les éléphants ont été épargnés d’un statut de ‘‘chef bandit’’ encombrant, pour continuer la compétition en toute sérénité et modestie. Et le sort semble jouer en leur faveur, jusqu’à la victoire finale certainement.
Les footballeurs de l’équipe nationale de Côte d’Ivoire l’ont compris : « Obah obah, ya pas obah obah dans ballon », en d’autres termes, le foot n’a que faire des fanfarons, de gens qui font les braves, surtout à l’ère des réseaux sociaux. Apparemment, il n’y a pas que les éléphants qui se sont rappelés ce vieux proverbe nouchi. Les Ivoiriens en ont fait désormais leur devise, et même sur les réseaux sociaux, à travers un mot d’ordre : « Humilité ». Et on n’hésite pas à rappeler à ce sujet le proverbe biblique : « L’arrogance de l’homme a précédé sa ruine ; l’humilité a précédé la gloire. » (Proverbes 18, 12).
Heureusement, c’est sans hypocrisie et en toute sincérité que tous, joueurs et supporteurs, semblent faire preuve de modestie, déjà que le proverbe bété le dit : « Le ventre ne tolère pas le ventre, est-ce le dos qu’il va tolérer ? ». L’Ivoirien accueillant de nature ne peut adopter des comportements qui n’ont rien à avoir avec l’accueil, au risque de ternir sa réputation déjà mise à mal sur les réseaux sociaux à cause d’une notoriété de moqueur et de ‘‘mal parleur’’
La responsabilité est l’attitude qui est certainement le fondement de la transfiguration des éléphants, notamment contre le Sénégal. Le proverbe baoulé l’enseigne : « On ne demande pas un derrière pour aller à la selle ». Si on n’en a pas on n’y pas va pas. Simplement.
La CAN est en effet certes une compétition internationale, avec des sélectionneurs originaires des quatre points du globe, mais elle est et reste avant tout un tournoi africain, avec ses réalités, ses mythes et ses mystères. C’est en cela que l’ancien sélecteur des éléphants, Jean Louis Gasset, qui n’avait auparavant aucun vécu, ni avec un club de foot africain, ni avec une équipe nationale du continent et même qui ne vivait pas en Côte d’Ivoire pendant qu’il coachait les éléphants, semblait juste un cheveu sur la soupe pour l’équipe national de Côte d’Ivoire.
Le fait qu’il ait été remercié et remplacé dare-dare, à cause de ses échecs au premier tour, par un ancien de l’équipe nationale, Faé Emerse, a fait d’énormes biens aux éléphants. Aussi, grâce notamment au coaching gagnant de ce dernier, l’équipe a pu utiliser toutes ses ressources pour remporter la victoire contre le Sénégal en huitième et le Mali en quart, et maintenir ainsi intacts, le mythe quant à l’invincibilité de la Côte d’Ivoire face à ces nations de foot. Le proverbe atchan (peuple lagunaire de la Côte d’Ivoire) le dit, aux dirigeants du football ivoirien en particulier : « Personne ne peut adorer ton fétiche mieux que toi-même ». Les valeurs locales doivent être priorisées.
Le moins qu’on puisse dire justement au sujet des premiers pas de Faé Emerse à la tête des Éléphants, c’est que le lien entre le sélectionneur et son équipe est avant tout mystique, surtout lorsqu’il y a dans l’ombre 30 millions de fanatiques prêts à vous encenser quand il y a victoire et à vous clouer au pilori quand c’est le contraire.
Sa terre ne saurait les abandonner, ses poulains et lui, à la vindicte populaire car elle leur garantie la victoire finale. Pour ce faire ou pour réussir le proverbe baoulé enseigne encore ceci : « Va, couche-toi, réfléchis, voilà la meilleure sagesse ». Il faut prendre son temps, bien réfléchir au lieu d’agir avec précipitation, il faut avancer progressivement sans brûler les étapes. Il y a à se réjouir car la sérénité et le calme du sélectionneur ivoirien disent qu’il agit déjà ainsi. Mais pour parachever son travail par la victoire finale, la discrétion doit toujours être de mise, car : « Le chien qui aboie ne mord pas, c’est celui qui paraît tranquille qui mord ».
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