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Il y a ministre et ministre (1)

Nelson Mandela CC Flickr.com

Une fois n’est pas coutume, j’ai décidé de visiter le mystère du ministère ou du service. Le ministre est une personne qui se met au service des autres. Exerçant un service public, le président de la République, comme le simple ministre (évidemment) ou toute autre autorité sont tous des ministres. Normalement motivé par des charges et des obligations, le ministre a pourtant tendance à réaliser le contraire de ses fonctions.

On le dit en l’ignorant certainement, le terme ministre vient du latin minister qui veut dire serviteur.

Ça, c’est dans le dictionnaire car dans la réalité  le ministre  semble être : le khalife plus que le khalife ; bien qu’être l’un ou l’autre n’est pas louable, il est à la fois Ali Baba et les 40 voleurs ;  zélé plus que le mot lui-même, il est en même temps les gardes du corps et le corps à garder. En somme, c’est Dieu sur la terre… Des dieux sur  terre, il y en a pourtant de vrais. Pas besoin d’incantations (ces interminables discours démagogiques), d’actions d’éclats (ces lois qu’on ne peut raisonnablement assumer mais qu’on se presse de prendre juste pour se faire voir), ou pire, pas non plus besoin de bouleversements forcés ou violents (en l’occurrence les opérations de déguerpissements impulsives, ou l’usage de la matraque sous prétexte d’émergence ) pour reconnaître ces vrais serviteurs.

Ces dieux  sur  terre, ou ces serviteurs des Hommes, parce que c’est d’eux qu’il s’agit,  sont simplement reconnaissables par la simplicité, voire la douceur, de leur présence. Et la Bible, notamment le premier livre des Rois dans l’ancien testament nous en donne un exemple remarquable à plus d’un titre à travers la rencontre entre Yahvé et Élie pendant que celui-ci se trouvait en difficulté dans le désert, fuyant les menaces de mort de Jézabel après qu’il ait massacré les faux prophètes, ceux de Baal.

 Yahvé répondit : “Sors et tiens-toi dans la montagne devant Yahvé.” Et voici que Yahvé passe. Un vent fort et violent passe en avant de Yahvé, il déchire les montagnes et fend les rochers, mais Yahvé n’est pas dans le vent. Après le vent, un tremblement de terre, mais Yahvé n’est pas dans le tremblement de terre.  Après le tremblement de terre, un feu, mais Yahvé n’est pas dans le feu. Après le feu, ce fut le murmure d’un souffle léger. Lorsque Élie l’entendit, il se couvrit le visage avec son manteau, il sortit et se tint à l’entrée de la grotte. Alors une voix se fit entendre : “Que fais-tu ici, Élie ?” » (1Rois, 19, 11-13)

Remarquons que Yahvé, Dieu, que les croyants assimilent au don, ou au service, par excellence n’est pas présent dans le vent fort et violent, ni dans le tremblement de terre, ni dans le feu. Ces trois éléments (ouragan, tremblement de terre et feu) symbolisent la violence, l’orgueil, la colère, les prétentions… La désolation et les peines que ces derniers infligent aux Hommes décrivent parfaitement les conséquences de leurs actions sur ceux-ci.

Pour les faux ministres, c’est à  dire ces serviteurs de l’État (même les présidents de République) qui sont animés par la violence, l’orgueil, la colère, les prétentions et les comportements similaires, seul compte, comme ouragan, tremblement de terre et feu,  l’exercice de leur autorité. Leur égo est au centre de leurs préoccupations. À cet effet, les « services » des faux ministres  annoncent des échecs patents, ne mènent à rien ou tout au plus à un perpétuel recommencement.  Par exemple :

  • au Burkina Faso, l’arrivée violente (par coup d’État et assassinat) au pouvoir de Blaise Compaoré en 1987 a débouché 28 ans plus tard sur un soulèvement populaire pendant lequel des infrastructures construites pendant son règne ont été détruites ;
  • tous les régimes qui se sont succédé en Côte d’Ivoire après le décès de Félix Houphouët-Boigny en 1993 l’ont tous été d’une façon ou d’une autre dans la violence si bien que leurs pouvoirs ont plutôt contribué à accroitre la pauvreté et rendre ainsi la vie plus dure. En 1993 déjà, une bataille constitutionnelle s’engage entre Konan Bédié (président de l’assemblée nationale) et Alassane Ouattara  (Premier ministre). Le premier (héritier constitutionnel) l’emporte naturellement et devient chef de l’État ; en 1999 le général Robert Guéï accède au pouvoir par coup d’État ; Laurent Gbagbo lui succède l’année suivant dans des conditions désastreuses. Ce dernier laissera le pouvoir à Alassane Ouattara en 2011 après une guerre.

Ces serviteurs de l’État, et les autres  à travers eux,  n’échouent pas sciemment, mais leur accession violente à la tête des pays les conditionne à exercer leur pouvoir de la même façon de sorte que pour se maintenir au pouvoir l’option sécuritaire prime sur tout programme de développement. Ce qui, à court terme, débouche comme en Côte d’Ivoire sur des répressions à n’en point finir et une alternance violente au pouvoir. À long terme, cette situation conduit,  notamment au Burkina Faso, au despotisme, à un soulèvement populaire, des chasses aux sorcières, des velléités de coup d’État, en sommes à des situations qui n’ont rien à avoir avec le développement.

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Auteur·e

revedehaut

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